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tempêté dans l’intérieur de grönland,.

couche en avait été amoncelée contre notre tente et la protégeait contre l’ouragan. Tout à coup, vers midi, calme plat. La tempête n’est pas encore terminée, nous le savons par expérience, une saule de vent se prépare ; dans quelque temps le vent soufflera plus terrible qu’auparavant. Nous attendons la tourmente. Elle ne vient pas vite, et quelques-uns proposent déjà de partir. Subitement un léger souffle se fait sentir du nord-ouest, puis bientôt arrivent des rafales plus violentés encore qu’auparavant. Maintenant la tempête souffle juste devant la porte de la tente et chasse sur nous des tourbillons de neige. Balto avait profité de l’embellie pour remplir de névé le bidon de la lampe ; surpris par l’ouragan, il ne put retrouver son chemin qu’à grand’peine.

Il faut s’occuper encore une fois de consolider notre abri. Le côté exposé actuellement au vent est la partie faible de la tente : aussi agitons-nous la question de la changer de place.

Avec les ski, les bâtons, les raquettes, nous renforçons la toile, et avec des sacs, des vêtements, nous bouchons la porte aussi bien que possible. Toutes les ouvertures sont maintenant fermées, et il serait impossible de sortir si cela devenait nécessaire.

Nous préparons du café, et après l’avoir pris nous nous blottissons dans les sacs de couchage. Pour passer le temps, les fumeurs ont aujourd’hui la permission de fumer une pipe.

Seul Ravna est triste et ne cesse de répéter, lorsque j’essaye de le rassurer : « J’ai vécu sur les montagnes et je sais bien que les tempêtes d’automne durent longtemps ». Rien ne peut faire démordre le bonhomme de son idée fixe.

Le lendemain matin le vent a molli et nous pouvons poursuivre notre route. Avant de sortir de la lente, il faut déblayer la couche de neige qui l’ensevelit presque jusqu’au sommet. Les traîneaux sont également enfouis sous des monceaux de névé. Les préparatifs du départ sont assez longs et le traînage particulièrement pénible.

Le journal de Balto contient le passage suivant, qu’il me paraît intéressant de reproduire ici :

« Le temps est affreux, écrit-il. Pendant toute la journée, tourmente et chasse-neige. Nous n’en continuons pas moins la marche jusqu’au