Page:Narrache - Jean Narrache chez le diable.djvu/94

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grands-pères et leurs pères sont arrivés, ici, sans le sou, sans influence, sans protecteurs. »

— « Les premiers arrivés ont été plutôt des commerçants de ferraille, de guenilles et de rebuts. Ils ont été honnis, ridiculisés, bafoués de tous. »

— « N’empêche qu’aujourd’hui, ils contrôlent des industries et des commerces imposants. Ils sont riches à millions. Crois-tu réellement que c’est grâce au favoritisme de nos compatriotes de langue anglaise, qui les auraient aidés de préférence à nous ? »

— « Je n’en vois nulle part la preuve. »

— « Considère aussi les succès de nos compatriotes d’ascendance grecque, syrienne, italienne, chinoise. »

— C’est donc à dire que si tous ces gens-là, partis à zéro, ont réussi, il faut trouver ailleurs les raisons de notre infériorité et laisser Chaput et ses adeptes brailler et maudire les Anglais.

— « Qui sait, Louis, si la faute n’est pas due à notre propre insouciance, à notre paresse, à notre ignorance ? Trop des nôtres n’ont-ils pas plutôt du sirop d’érable que du sang dans les veines ! »

— « Tu as raison. Parmi les nôtres, il y en a cependant une foule qui ont merveilleusement réussi et qui se sont amassé de fort jolies fortunes. Regarde-les les uns après les autres. Tu constateras que ce sont des travailleurs, des audacieux, des gens qui ont du cœur au ventre et une tête sur les épaules. Par contre, nomme-moi donc des compatriotes de langue anglaise qui ont voulu les empêcher de réussir », ajouta Francœur.