J’espère pour la jeune personne de Clichy-Levallois que cette médiocre facétie n’est pas d’elle, — mais au moment où je vais demander à Léonard quelques renseignements complémentaires sur le père Mabire, un bruit de galop dérange mes idées. Je me retourne et aperçois un bonhomme de type vraiment ignoble — qui s’arrête court.
La nature l’a gratifié de petits yeux de goret, clignotants et féroces, d’un large nez « flaireur » dans chaque narine duquel on introduirait aisément une forte noisette, d’un teint violet mat, si l’on peut ainsi dire, et d’une grosse et répugnante moustache de phoque. Il est nimbé d’une casquette plate, vêtu d’un complet « oubli d’oie » sur lequel une blouse bleue déboutonnée du haut, toute raide et luisante d’apprêt fait cloche.
En galopant, il traînait un petit chariot-joujou au bout d’une ficelle dont une extrémité s’enroule autour d’un énorme pouce tordu et noir d’être velu. Un instant interdit quand il a vu qu’on l’observait, il se remet bientôt et repart, cette fois au pas, en donnant des secousses à la ficelle comme s’il conduisait par le bridon un cheval rétif. Tout en marchant il hurle plutôt qu’il ne chante sur un air qui rémémore à la fois l’immortel motif ; « Voilà l’raccommodeur de faïence et d’purcelai-no ! » et cette autre excellente mélodie : « Rempailleu’d’chaises ! rempailleu’d’chaises ! » — mais dont le rythme est plus accéléré : « En avant les p’tits lapins ! les choux ! les trompettes ! Mon père s’est pendu ! »