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Page:Nau - Hiers bleus, 1904.djvu/48

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HIERS BLEUS

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Tout a son double en moi, jusqu’aux choses banales
Ces stores bêtes où d’affreux Mongols de carnaval
Exultants sabreurs à barbes de fil de fer

Se livrent à d’écœurantes danses guerrières

Ces tentures ornées de Chinoises qui baillent
Et bâillent le hurlant ennui qui les ravage,

Ces écrans où se ruent en vols fous, en nuages,
Les diables des fumées d’opiuru, ces éventai ts,
Monstrueux papillons souffletant les murailles.

Puis tout s’efface Plus rien que des parois nues
Fendillées par les fresques blêmes de la pluie.
Je suis seul La petite amie bleue s’est enfuie
Et les prunelles noires, je ne les ai pas lues
Il ne reste plus rien, dans le désert de plâtre,
Qttedeux toiles jetées contre un mur deux ébauches
Sur l’une d’anxieux grands yeux noits me regardent,
Emergeant de la brume où le visage plonge,

Beaux yeux très amis, ttès doux, mais pleins d<- rEproche
Qui m’attirèrent, à mon insu, jusqu’ici

De l’avenue aux parfums de lourde verdure.

L’autre, c’est un étang chryséen qui fure

Près d’un bois mo’te d’arbres pleureurs et transis
Flottante, à la surface, une robe s’azure

Sous un morne vol d’oiseaux de mer égarés.