Page:Naudet - Notice historique sur MM. Burnouf, père et fils.djvu/39

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commença-t-il à se connaître, qu’il n’avait plus à être témoin ni à souffrir sa part de ces misères. Tout souriait autour de lui, chez lui ; tout respirait l’allégresse dans le bien-être de la fortune présente, dans la sécurité de l’avenir garanti par le mérite et le courage. Le père de famille venait d’être rendu à la dignité de sa vocation, à sa patrie littéraire, à sa liberté studieuse ; et l’enfant, plus favorisé que lui, n’eut pas à recevoir du secours d’autrui le bienfait de l’éducation ; il trouvait dans la maison paternelle le maître qu’il eût choisi entre tous, s’il avait eu à choisir.

Ses progrès furent brillants et rapides, mais non hâtés prématurément, par urgence et par contrainte. À un tel disciple, il n’était pas besoin de l’instance du pédagogue ; et un tel mentor voulait que, dans cette intelligence dont il observait avec bonheur les qualités rares et la vigueur naissante, l’instruction fût le fruit du libre amour d’apprendre. Hélas ! Eugène Burnouf n’a que trop bien rempli, trop persisté à remplir, à dépasser de tels vœux.

Son père, attentif à interroger tous ses instincts précoces et à leur offrir les objets d’application les plus divers et les plus solides, le conduisit, en sortant du collège, aux leçons de l’École des chartes. Elle n’existait alors qu’en germes, en rudiments, et ne laissait point soupçonner, ne soupçonnait pas elle-même les heureux développements que son organisation recevrait un jour et qui l’ont placée, depuis quelques années, au rang des établissements les plus notables d’instruction publique. Toutefois les conversations, je ne dirai pas les cours, du savant abbé Lespine, et les essais de lectures paléographiques sous sa direction, avaient bien quelque analogie avec les déchiffrements d’autres manus-