Page:Nel - L'empoisonneur, 1928.djvu/67

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
66
L’EMPOISONNEUR

No… qu’on avait entendu la détonation d’une arme à feu dans un immeuble situé au No. rue… »

« Le constable J. B. Wood fut envoyé sur les lieux aux fins d’enquête. Son premier coup de sonnette n’obtenant pas de réponse, il carillonna avec énergie, tout en assénant contre la porte quelques bons coups de son « club ». Alors, au second étage, une fenêtre s’ouvrit, à laquelle un vieillard se montra, interpellant le constable en ces termes :

— Qu’est-ce que tu me veux ?

— Est-ce que des coups de feu ont été tirés ici ?

— T’as rêvé !

— Eh bien ! laisse-moi entrer et perquisitionner.

— Essaye d’y arriver ! (Try and get it !)

« Ce disant, le vieillard montra d’un air menaçant sa main armée d’un pistolet automatique ; au même moment, une voix de femme s’éleva derrière lui ; alors, il referma hâtivement la fenêtre en criant :

Achale-moi pas ! (Don’t bother me !)

« Presqu’aussitôt, on entendit des cris de frayeur poussés par une femme et le constable s’empressa de téléphoner à la police pour demander de l’aide, qu’il attendit sur place, restant en faction à l’angle de la première rue adjacente.

« La patrouille arriva bientôt et les policiers firent voler la porte en éclats, à coups de haches, puis pénétrèrent, revolver au poing ; ils furent accueillis par une volée de balles : du haut de l’escalier, deux hommes déchargeaient sur eux leurs armes ; les policiers se hâtèrent de riposter et les bandits durent reculer, mais non sans avoir fait une victime, dans la personne du constable A. Smith, père de cinq enfants, grièvement blessé à la tête et au poumon droit.

« L’escouade de police monta l’escalier avec précaution et se trouva bientôt en face d’une seconde porte fermée. Le sergent Anthony Salesworth, chef de l’expédition, intima aux assiégés de se constituer prisonnier ; pour toute réponse, l’un des occupants asséna de violents coups de crosse de revolver dans le centre de la porte, s’y taillant une sorte de lucarne ; puis, y montrant son visage grimaçant de vieux bandit, il demanda tranquillement :

— Eh bien ! qu’est-ce que vous me voulez ?

« Sans cesser de le tenir en joue, le serpent Salesworth réitéra sa sommation :

— C’est bon ! gouailla l’homme, fallait donc le dire tout de suite, au lieu de défoncer les portes !

« Et il fit mine d’ouvrir, mais instantanément, la gueule d’une mitrailleuse portative parut dans la lucarne, transformée en meurtrière, et cracha une volée de balles.

« Les constables dégringolèrent en hâte l’escalier, sans toutefois se départir de leur courage, car ils ne manquèrent pas d’emporter avec eux le cadavre du serpent Salesworth, mort au champ d’honneur.

« SIÈGE EN RÈGLE »

« Alors, des coups de téléphones furent échangés et des renforts arrivèrent, convenablement armés. Les autos-mitrailleuses eurent vite fait de démanteler les fenêtres que fouillaient les feux de puissants projecteurs et une escouade, munie de grenades lacrymogènes, chercha accès sur les toits, par les maisons voisines.

« La besogne était périlleuse, car, bien que soigneusement dissimulés, les bandits faisaient bonne garde et une volée de projectiles saluait chaque imprudence des assaillants. Des ordres formels ont été donnés pour qu’aucune autre vie ne soit exposée, car on compte bien réduire les assiégés par les gaz, et, au besoin, par la fatigue et la faim.

« UNE IDÉE ORIGINALE »

« Au moment où nous mettons sous presse, nous apprenons que les pompiers ont été appelés à la rescousse. Un jet d’eau puissant a été dirigé dans le logement, qui doit être complètement inondé ; la nuit étant plutôt fraîche, on prévoit que les bandits, trempés comme des soupes, verront leur ardeur abattue par le froid et demanderont grâce.

« Une foule considérable a été attirée sur les lieux et un service d’ordre a dû être établi pour arrêter toute circulation dans la zone de feu. Les toits des maisons voisines, rapidement évacuées, sont garnis de policiers embusqués et toutes les précau-