Aller au contenu

Page:Nel - Le crime d'un père, 1930.djvu/43

La bibliothèque libre.
Cette page n’est pas destinée à être corrigée.
41
LE CRIME D’UN PÈRE

LA VIE CANADIENNE 41 La France est la grande productrice du livre ; elle est une créatrice d’idées, une semeuse de beautés, une mine, si l’on peut s’exprimer ainsi, de chefs-d’ocuvres. Tout ce que la Frane touche : art, lettres, sciences, elle l’embellit, l’ennoblit, le magnifie en quelque sorte et en recule pour ainsi dire le domaine de jour en jour. La France, encore une fois, c’est la mine féconde ouverte aux intellectuels de tous les pays et dont personne ne peut se passer. Mais, il est un danger dans lequel, nous tombons tous plus ou moins. C’est celui de croire que la France seule peut produire quelque chose de beau et de bon dans le domaine de l’art. Parce que le génie français rayonne sur l’univers, parce que le talent fleurit par toute la France, nous sommes portés à croire que personne chez nous n’est capable de produire quoi que ce soit qui vaille la peine d’être vu, lu ou entendu. C’est pourquoi nos amants de l’art, nos musiciens, nos artistes et nos poètes restent dans l’ombre. Nous les oublions. Nous les dédaignons même parfois. Les gens qui se piquent d’intellectualité, les gens, comme on dit, quelque peu frottés donnent aveuglément dans le plus détestable snobisme. Feignant de planer dans les hautes sphères, ils recherchent uniquement pour la pose les livres étrangers et ignorent dédaigneusement nos meilleurs auteurs. Les autres , ceux qui ne lisent pas, ne touchent pas plus au livres étrangers qu’à ceux de chez nous. Contents de leur ignorance, ils aiment à y vivre et à y mourir. Voilà pourquoi nos auteurs canadiens restent dans l’ombre, leur mémoire tombe dans l’oubli et leurs livres restent sur les tablettes de nos librairies. C’est pour lutter efficacement contre ce snobisme et cette indifférence d’un grand nombre des nôtres que l’on organise depuis plusieurs années dans notre province une semaine du livre canadien. Cette campagne a déjà produit des résultats bienfaisants, mais il faut continuer dans cette voie. Prenons donc la bonne résolution d’acheter quelques bons livres canadiens et d’aider par tous les moyens possibles à leur diffusion. Ce sera mieux que d’encombrer nos maisons de livres et revues américains qui ne valent pas, pour la plupart, les ouvrages de nos meilleures plumes canadiennes. ‘‘L’Acadie Française” Incendiée Un malheur vient de frapper les lettres canadiennes, et plus précisément les Mélanges historiques de Benjamin Suite. En effet, l’édition du 16e volume intitulé L’Acadie française, et de laquelle nous avons ici-même entretenu nos lecteurs depuis quelques mois, vient de périr, traîtreusement brûlée dans le gros incendie survenu aux ateliers de nos relieurs, 27 rue Notre-Dame est, à Montréal, dans la nuit du 20 au 21 janvier. Tout a été détruit de fond en comble par l’inexorable feu. Sauf, cependant, quinze exemplaires sauvés comine par miracle quelques instants même avant la découverte des flammes. A peine née, après un labeur de plusieurs mois L’Acadie française devient un ouvrage rarissime, un incunable que chercheurs et collectioneurs voudront avoir, et que, malheureusement, nous ne pourront satisfaire. Les nombreux souscripteurs qui nous en avaient fait la demande et les amis à qui la reconnaissance nous imposait des générosités personnelles voudront bien nous pardonner de ne pouvoir les fournir d’un ouvrage si impatiemment attendu. Mais l’homme propose et Dieu dispose. A l’heure où le fruit de tant de labeurs allait recevoir un sort si cruel, quatre intimes amis, que nous pourrions appeler des privilégiés, avaient déjà reçu des mains du compilateur la copie qui leur était échue : ce sont le sénateur Pascal Poirier, historien et linguiste acadien, Victor Morin, antiquaire doublé d’un érudit, Algidius Fauteux, bibliothécaire à St-Sulpice, et W.-A. Baker, poète et philosophe. Ces amis personnels de Benjamin Suite ont toujours eu un faible pour ses Mélanges historiques. L’éditeur et le compilateur s’étant aussi justement servis, il reste donc neuf exemplaires que le propriétaire a taxés. Ces neuf exemplaires uniques d’une édition de mille, nous les offrons strictement à des collectionneurs sérieux à un prix très spécial de $5.00 chacun. D’aucuns prétendront que l’éditeur est un peu exigeant. Le cas s’est déjà vu et nous pouvons assurer que même à ce prix, L’Acadie française est une aubaine. Gérard MALCHELOSSE.