Page:Nemo - L’Amitié, 1884.djvu/51

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Il est un ami qui se change en ennemi. C’est la rouille qui revient sans cesse au cuivre.

Il est un ami qui découvre sa haine et se répand en querelles, bien au-dessous d’un sage ennemi. Si vous lui devez, il court chez le commissaire-priseur, demander le prix de vos meubles, avant qu’il ne soit versé. Il est bien près de vous livrer.

Il est un ami, parce qu’il va de pair avec vous pour la fortune et par fierté de caste et de rang.

Il est un ami qui ne l’est que de nom. Sur tous, ne faites fond non plus que sur une dent pourrie et n’appuyez dessus non plus que sur la glace d’une nuit.

Il est un ami qui ne manque que de tact et vous fait des plaies plus profondes que votre ennemi.

Il est un ami qu’on redoute presque, dès qu’il apparaît, qui vous accable de sa fade autant que sa verbeuse loquacité ; qui pense peu, s’il pense, et parle de tout, sans avoir beaucoup appris ; qui n’habite que les dehors de son âme et ne cultive que la superficie de son esprit, qui n’approfondit rien, qui ne voit que les surfaces. Vase fêlé, tonneau des Danaïdes, on n’en saurait trop se garder.

C’est un de ceux qu’il est dit : les ennemis de l’homme sont ceux de sa maison. Mieux se vaudrait confier à un cheval sauvage.