Page:Nemo - L’Amitié, 1884.djvu/40

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l’aliénation d’un incomparable héritage, fuir la joie de son cœur, l’ornement de sa vie ?

À qui jamais, s’il en fut tenté, le déplaisir, la peine qu’en éprouverait son ami ne seraient d’infranchissables barrières ?

Desaix, Desaix, à la pensée d’une lâcheté qui eût fait saigner le cœur du premier consul, ne se fût donc pas révoltée ton âme de héros ?

Combien, au souvenir d’un ami, eussent échappé au naufrage, quand ils ont malheureusement heurté, sombré ! Combien, les lèvres à la coupe enchanteresse du plaisir, pourraient, dans les sages entretiens d’un ami, épurer leur pauvre raison et se guérir de lamentables folies !

Ô trop précieuse, ô sainte amitié, qui serait assez osé pour te refuser son estime ? Qui, pour refuser de t’avoir en honneur ? Quel particulier, quel prince, quel gouvernement des hommes ?

Puissance trop peu connue !

À l’amitié, la garde des mœurs !

À l’amitié, un élan de plus vers ce qui est grand, vers ce qui est vraiment honorable, vraiment beau !

À l’amitié, comme l’essor à la vertu, à l’héroïsme, des ailes au génie !