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Page:Nerciat - Félicia.djvu/73

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de quelques hardes de nuit, il aurait péri dans son cachot, s’y étant évanoui ; que je lui avais sauvé la vie ; qu’égaré par la reconnaissance, il avait mésusé de mon attendrissement pour parvenir à certain but… que j’ignorais absolument, et dont je ne m’étais doutée que lorsqu’il n’était plus temps de me défendre ou d’appeler du secours. Il ne tint ainsi qu’à ma tante de se faire honneur de ce qui m’était arrivé. Cette justification, la rare beauté de l’orateur, le désir de se tromper elle-même désarmaient insensiblement sa colère ; elle oubliait de retirer des mains du coupable une des siennes qu’il couvrait de baisers ; elle écoutait deux fripons d’yeux, qui lui disaient avec un grand air de vérité : Pourquoi me voulez-vous tant de mal quand vous êtes la seule cause de ma faute ? C’était vous que je méditais de surprendre ; et je ne suis déjà que trop malheureux de n’avoir pas réussi.




CHAPITRE XXV


Où Sa Grandeur fait briller un grand esprit de conciliation.


Pour que ma confusion fût complète, il ne me manquait plus que monseigneur : aussi ne tarda-t-il pas d’arriver. On n’avait point fermé la porte après l’entrée du chevalier ; jamais on n’annonçait son oncle, qui, leste, marchant toujours sur la pointe d’un petit pied, on ne peut pas moins bruyant, nous surprit de la sorte et vit, sans y penser malice, monsieur son neveu aux pieds de Sylvina. Avant d’en être vu lui-même, il eut le temps de les considérer et de me faire un petit signe d’intelligence. J’étais si troublée que je n’avais fait, en le voyant paraître, aucun mouvement