elle se dérobe, s’empare du fameux godemiché
qu’elle n’a pas un moment perdu de vue, le ceint,
et dans un clin-d’œil vous cloue pardevant cette
pauvre Nicole, qui déja n’ayant pas grand plaisir
à l’être parderriere, trouve pour le coup sa
position des moins agréable. Elle souffre, elle demande
quartier, on ne l’écoute point, et c’est à
qui la secouera davantage : ces quatre bras qui l’étreignent
la fatiguent ; ces deux bouches qui tour-à-tour
cherchent la sienne, ou se baisent en se rencontrant,
l’excedent ; les fumées bachiques engendrent
chez elle une sombre humeur ; elle se fâche :
on se moque d’elle ; cette contrariété l’irrite : elle
se débat, enrage de ne pouvoir se dégager, frappe
enfin autour d’elle, et meurtrit le satin délicat de
la galante Comtesse : celle-ci n’a garde de s’en
fâcher, elle flatte au contraire, replique aux injures
par des douceurs, et pour des coups de poing rend
d’amoureuses morsures… M. Frédéric, moins
tendre, se lasse le premier d’avoir les cuisses
pincées, égratignées, les cheveux arrachés, et d’endurer
en un mot, tout le petit mal qu’il est possible
de lui faire. Il s’esquive et ménage si peu les deux
autres figures de leur grouppe, que la Comtesse
est jetée de côté, séparée de son godemiché dont
les attaches se sont rompues, et qui reste planté
chez Nicole. Celle-ci, sans penser à s’en défaire,
court ainsi transfigée après Frédéric, qu’elle brûle
de bien battre, mais elle fait un faux pas et tombe
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LE DIABLE AU CORPS.