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Page:Nerciat - Monrose, 1871.djvu/591

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MONROSE


je raisonne en ce moment comme Aglaé ; c’est sa pensée que je vous dévoile, son trouble que je vous peins.

Nous ne l’avions point aperçue, nous ; mais il n’en fut pas de même chez madame d’Aiglemont. Entrevoir Aglaé, se dégager, courir après elle, l’atteindre, la ramener au boudoir, c’est l’ouvrage d’un instant pour l’agile Monrose, qui déjà devançait le prompt commandement de la marquise. Il est bien important pour celle-ci qu’un dangereux secret ne s’envole pas avec celle qui vient de s’en emparer. La vestale est furieuse. Ce n’est pas uniquement sa pudeur que tant de visions obscènes ont révoltée : c’est sa bonne foi, c’est son franc amour, qui mesurent l’énormité de l’outrage à la toise des préjugés et l’analysent avec la loupe de la passion outrée. Captive, close, au pouvoir de l’infidèle marquise et de mon neveu, qu’elle trouvait bien fourbe, car il avait presque fait croire à de tendres sentiments, dont au surplus on ne lui savait aucun gré, mais qui ne laissent pas de caresser l’amour-propre ; désolée d’avoir été dupe de tous côtés et depuis longtemps sans doute ; effrayée de la fragilité de tous les points d’appui de ses chères illusions, Aglaé n’est plus cet ange qui ci-devant ne respirait qu’amour