Page:Nerval - Élégies nationales et Satires politiques, 1827.djvu/132

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Ce projet m’a semblé trop dur à digérer ;
Et que sera-ce donc, si jamais il arrive
Que vous le présentiez dans sa beauté naïve ?…
Bientôt un juste cri d’horreur et de courroux,
De tous côtés parti, s’élancerait sur vous ;
On verrait aussitôt, déchus du rang suprême,
Les six petits tyrans crouler sous l’anathême :
Et, comme il eût déjà tout pris sous son bonnet,
On conçoit bien qu’alors messire Draconnet
Ne serait pas sans peur, non plus que sans reproche,
Et dirait, un peu tard : J’ai fait une brioche !
Ne vous exposez pas à des regrets certains,
Seigneur ; de vos amis concevez les chagrins,
Quand un nouveau concierge en vos nobles demeures
Voyant, selon l’usage, accourir à cinq heures
Les trois cents invités d’un banquet solennel,
Leur dirait : C’en est fait ! le dieu manque à l’hôtel !


DRACONNET.

Oh ! je n’ignore pas qu’ils aiment ma cuisine,
Et moi par contre-coup, car c’est chez moi qu’on dîne.
Mais, si le sort trompait mon effort glorieux,
Cet hôtel cependant aurait de nouveaux dieux ;
Et mes trois cents amis, pour avoir la pitance,
Leur iraient humblement tirer la révérence.