Page:Nerval - Aurélia, Lachenal & Ritter, 1985.djvu/166

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est bon, mais de votre humeur, qui est légère et changeante ! Songez que vous m’avez mis dans une position telle, vis-à-vis de vous, que l’abandon me serait beaucoup plus affreux que ne le serait une infidélité quand je vous aurais obtenue. En effet, dans ce dernier cas, qu’aurais-je à dire ? le ressentiment serait ridicule à mes propres yeux ; j’aurais cessé de plaire, voilà tout, et ce serait à moi de chercher des moyens de rentrer dans vos bonnes grâces. Je vous devrais toujours de la reconnaissance et je ne pourrais, dans tous les cas, douter de votre loyauté. Mais songez au désespoir où me livrerait votre changement dans nos relations actuelles ! Oh ! mon Dieu ! vous vous créez des craintes là où elles ne peuvent exister ! Pour ce qui est de la jalousie, c’est un côté bien mort chez moi… Quand j’ai pris une résolution, elle est ferme ; quand je me suis résigné, c’est pour tout de bon : je pense à autre chose et j’arrange mes idées d’après les circonstances. Mon esprit sait toujours plier devant un fait irrévocable. Ainsi, ma belle amie, vous me connaissez bien, maintenant ; je livre tout ceci à vos réflexions ; je ne veux rien tenir que de leur effet. Ne craignez donc pas de me voir ; votre présence me calme, votre entretien m’est nécessaire et m’empêche de me livrer au désespoir qui me tuerait !