Page:Nerval - Choix des poésies de Ronsard, 1830.djvu/131

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Non pas également ; car les uns je colloque
Aux suprêmes honneurs, des autres je me mocque :
Je les tiens en suspens ; puis, quand ils sont grisons,
Mourir je les renvoye auprès de leurs tisons :
Les autres finement je déçoy d’une ruse,
Les autres doucement je pipe d’une excuse ;
Je flatte en commandant, et tellement je sçay
Mesler bien à propos le faux avec le vray,
Que, paissant un chacun d’une vaine espérance,
Chacun est asseuré sans avoir asseurance.

Or, si tu veux me suivrez et venir de ma part,
Je n’usërày vers toy dèrràude ny de fard,
Je te tièhdrày parole, et ailras en peu d’heure
Comme ceux que tu vois la fortune meilleure :
T il es trop écolier : laisse tout et me suy,
Et deviens habile homme à l’exemple d’autruy. "
Je suis, je n’en mens point, bien aise quand je trompr
Ces fardés courtisans enflés de trop de pompe,
Qui toujours importuns à mes oreilles sont ;
Mais, honteuse y je porte une vergongne au front ?
Quand il me faut tromper par trop d’ingratitude
Ou les hommes de guerre, ou les hommes d’étude ;
Les uns gardent le sceptre, et les autres des rois
Éternisent l’honneur par une docte vois :
Je crains plus les derniers, d’autant que blanche ou noire
Ils font comme il leur plait, des hommes la mémoire.