Page:Nerval - Choix des poésies de Ronsard, 1830.djvu/342

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L’IMPORTUN,

OU LE FASCHEUX.


Charles, de mes péchez j’ai bien fait pénitence.
Or toi, qui te cognois aux cas de conscience,
Juge si j’ai raison de penser estre absous.
J’oyois un de ces jours la messe à deux genoux,
Faisant mainte oraison, l’œil au ciel, les mains jointes,
Le cœur ouvert aux pleurs, et tout percé de pointes,
Qu’un dévot repentir eslançoit dedans moi,
Tremblant des peurs d’enfer, et tout bruslant de foi ;
Quand un jeune frisé, relevé de moustache,
De galoche, de botte, et d’un ample panache,
Me vint prendre, et me dit, pensant dire un bon mot :
Pour un poète du temps, vous estes trop dévot.
Moi, civil, je me lève, et le bon jour lui donne.
(Qu’heureux est le folastre, à la teste grisonne,
Qui brusquement eust dit, avecq’ une sangbieu :
Oui bien pour vous, monsieur, qui ne croyez en Dieu !)