Page:Nerval - Contes et Facéties, 1852.djvu/38

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effrayé de se voir si fort en retard, se prit à courir de toutes ses forces, et, en quelques minutes, eut mis derrière lui les rues de la Monnaie, du Borrel et Tirechappe ; alors il ralentit son pas, et, quand il eut tourné la rue de la Boucherie-de-Beauvais, son front s’éclaircit en découvrant les parapluies rouges du carreau des Halles, les tréteaux des Enfants-sans-Soucis, l’échelle et la croix, et la jolie lanterne du pilori coiffée de son toit en plomb. C’était sur cette place, sous un de ces parapluies, que sa future, Javotte Goubard, attendait son retour. La plupart des marchands aux piliers avaient ainsi un étalage sur le carreau des Halles, gardé par une personne de leur maison, et servant de succursale à leur boutique obscure. Javotte prenait place tous les matins à celui de son père, et, tantôt assise au milieu des marchandises, elle travaillait à des nœuds d’aiguillettes, tantôt elle se levait pour appeler les passants, les saisissait étroitement par le bras, et ne les lâchait guère qu’ils n’eussent fait quelque achat ; ce qui ne l’empêchait pas d’être, au demeurant, la plus timide fille qui jamais eût atteint l’âge d’un vieil bœuf sans être encore mariée ; toute pleine