Page:Nerval - La Bohème galante, 1855.djvu/79

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Il est difficile de devenir un bon prosateur si l’on n’a pas été poëte — ce qui ne signifie pas que tout poëlo puisse devenir un prosateur. Mais comment s’expliquer la séparation qui s’établit presque toujours entre ces deux talents? 11 est rare qu’on les accorde tous, les deux au même écrivain : du moins Tun prédomine Tautre. Pourquoi aussi notre poésie n’est-elle pas populaire comme celle des Allemands? C’est, je crois, qu’il faut distinguer toujours ces deux styles et ces deux genres — chevaleresque — et gaulois, dans l’origine, qui, en perdant leurs noms, ont conservé leur division générale. On parle en ce moment d’une collection de chants nationaux recueillis eV publiés à grands frais. Là, sans doute, nous pourrons étudier les rhythmes anciehs conformes au génie primitif de la langue, et peut-être en sortira-t-il quelque moyen d’assouplir et de varier ces coupes belles mais monotones que nous devons à la réforme classique. La rime riche est une grâce, sans doute, mais elle ramène trop souvent les mêmes formules. Elle rend le récit poétique ennuyeux et lourd le plus souvent, et est un grand obstacle à la popularité deS poëraes.

Je voudrais citer quelques chants d’une province où j’ai été élevé et qu’on appelle spécialement « la France. » C’était en effet l’ancien domaine des empereurs et des rois, aujourd’hui découpé en mille possessions diverses. Permettez-moi d’abord de fixer le lieu de la scène, en citant un fragment de lettre que j’écrivais l’an dernier.