— Pourquoi ?
— Je le demande. Es-tu allé à Londres ?
— Trois fois.
— Eh bien, tu sais la splendeur de ses nuits, auxquelles manque trop souvent le soleil d’Italie ? Quand on sort de Majesty-Theater, ou de Drury-Lane, ou de Covent-Garden, ou seulement de la charmante bonbonnière du Strand dirigée par madame Céleste, l’âme excitée par une musique bruyante ou délicieusement énervante (oh ! les Italiens !), par les facéties de je ne sais quel clown, par des scènes de boxe que l’on voit dans des box[1]…, l’âme, dis-je, sent le besoin, dans cette heureuse ville où le portier manque, où l’on a négligé de l’inventer, de se remettre d’une telle tension. La foule alors se précipite dans les bœuf-maisons, dans les huître-maisons, dans les cercles, dans les clubs et dans les saloons !
— Que m’apprends-tu là ! Les nuits de Londres sont délicieuses ; c’est une série de paradis ou une série d’enfers, selon les moyens qu’on possède. Les gin-palace (palais de genièvre) resplendissants de gaz, de glaces et de dorures, où l’on s’enivre entre un pair d’Angleterre et un chiffonnier… Les petites filles maigrelettes qui vous offrent des fleurs. Les dames des wauxhalls et des amphithéâtres, qui, rentrant à pied, vous coudoient à l’anglaise, et vous laissent éblouis d’une désinvolture de pairesse ! Des velours, des hermines, des diamants, comme au théâtre de la Reine !… De sorte que l’on ne sait si ce sont les grandes dames qui sont des…
— Tais-toi !
VI
DEUX SAGES
Nous nous entendons si bien, mon ami et moi, qu’en vérité, sans le désir d’agiter notre langue et de nous animer un peu,
- ↑ Loges