Page:Nerval - Le Rêve et la Vie, Lévy, 1868.djvu/63

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les promesses que j’attribuais à la déesse Isis me semblaient se réaliser par une série d’épreuves que j’étais destiné à subir. Je les acceptai donc avec résignation.

La partie de la maison où je me trouvais donnait sur un vaste promenoir ombragé de noyers. Dans un angle se trouvait une petite hutte où l’un des prisonniers se promenait en cercle tout le jour. D’autres se bornaient, comme moi, à parcourir le terre-plein ou la terrasse, bordée d’un talus de gazon. Sur un mur, situé au couchant, étaient tracées des figures dont l’une représentait la forme de la lune avec des yeux et une bouche tracés géométriquement ; sur cette figure on avait peint une sorte de masque ; le mur de gauche présentait divers dessins de profil dont l’un figurait une sorte d’idole japonaise. Plus loin, une tête de mort était creusée dans le plâtre ; sur la face opposée, deux pierres de taille avaient été sculptées par quelqu’un des hôtes du jardin et représentaient de petits mascarons assez bien rendus. Deux portes donnaient sur des caves, et je m’imaginai que c’étaient des voies souterraines pareilles à celles que j’avais vues à l’entrée des Pyramides.

VI

Je m’imaginai d’abord que les personnes réunies dans ce jardin avaient toutes quelque influence sur les astres, et que celui qui tournait sans cesse dans le même cercle y réglait la marche du soleil. Un vieillard, que l’on amenait à certaines heures du jour et qui faisait des nœuds en consultant sa montre, m’apparaissait comme chargé de constater la marche des heures. Je m’attribuai à moi-même une influence sur la marche de la lune, et je crus que cet astre avait reçu un coup de foudre du Tout-Puissant qui avait tracé sur sa face l’empreinte du masque que j’avais remarquée.

J’attribuais un sens mystique aux conversations des gardiens et à celles de mes compagnons. Il me semblait qu’ils