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LES FILLES DU FEU

séries de catalogues n’avait pas produit de résultat.

— D’après quoi supposez-vous que c’est du Bucquoy ? dis-je à l’obligeant bibliothécaire qui était venu en dernier lieu.

— C’est que je viens de chercher ce nom aux manuscrits dans le catalogue des archives de la police : 1709, est-ce l’époque ?

— Sans doute ; c’est l’époque de la troisième évasion du comte de Bucquoy.

— Du Bucquoy !… c’est ainsi qu’il est porté au catalogue des manuscrits. Montez avec moi, vous consulterez le livre même.

Je me suis vu bientôt maître de feuilleter un gros in-folio relié en maroquin rouge, et réunissant plusieurs dossiers de rapports de police de l’année 1709. Le second du volume portait ces noms : « Le Pileur, François Bouchard, dame de Boulanvilliers, Jeanne Massé, — Comte du Bucquoy. »

Nous tenons le loup par les oreilles, — car il s’agit bien là d’une évasion de la Bastille, et voici ce qu’écrit M. d’Argenson dans un rapport à M. de Pontchartrain :

« Je continue à faire chercher le prétendu comte du Bucquoy dans tous les endroits qu’il vous a pleu de m’indiquer, mais on n’a peu en rien apprendre, et je ne pense pas qu’il soit à Paris. »

Il y a dans ce peu de lignes quelque chose de rassurant et quelque chose de désolant pour moi. — Le comte de Buquoy ou de Bucquoy, sur lequel je n’avais que des données vagues ou contestables, prend, grâce à cette pièce, une existence historique certaine. Aucun tribunal n’a plus le droit de le classer parmi les héros du roman-feuilleton.