Page:Nerval - Les Filles du feu.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
14
LES FILLES DU FEU

« Les lanternes ont été posées sous les guichets du Louvre suivant votre intention, et je tiendrai la main à ce qu’elles soient allumées tous les soirs. »

La phrase était terminée ainsi dans l’écriture du secrétaire, qui avait copié le rapport. Une autre main moins exercée avait ajouté à ces mots : « allumées tous les soirs, » ceux-ci : « fort exactement. »

À la marge se retrouvaient ces mots de l’écriture évidemment du ministre Pontchartrain : « L’on ne peut trop. »

La même note que pour l’abbé de Bucquoy.

Cependant, il est probable que M. de Pontchartrain variait ses formules. Voici autre chose :

« J’ai fait dire aux marchands de la foire Saint-Germain qu’ils aient à se conformer aux ordres du roy, qui défendent de donner à manger durant les heures qui conviennent à l’observation du jeusne, suivant les règles de l’Église. »

Il y a seulement à la marge ce mot au crayon : « Bon. »

Plus loin il est question d’un particulier, arrêté pour avoir assassiné une religieuse d’Évreux. On a trouvé sur lui une tasse, un cachet d’argent, des linges ensanglantés et un gand. — Il se trouve que cet homme est un abbé (encore un abbé) ; mais les charges se sont dissipées, selon M. d’Argenson, qui dit que cet abbé est venu à Versailles pour y solliciter des affaires qui ne lui réussissent pas, puisqu’il est toujours dans le besoin. « Aincy, ajoute-t-il, je crois qu’on peut le regarder comme un visionnaire plus propre à renvoyer dans sa province qu’à tolérer à Paris, où il ne peut être qu’à charge au public. »

Le ministre a écrit au crayon : « Qu’il luy parle auparavant. » Terribles mots, qui ont peut-être changé la face de l’affaire du pauvre abbé.