Page:Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/237

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Le républicisme, ajoute-t-il, comme le conçoivent Robespierre et quelques autres, est l’anarchisme, un gouvernement inétablissable ; mais les chefs qui sont dans l’Assemblée nationale sont soutenus par des subalternes, auxquels on ne fait pas assez d’attention : Camille Desmoulins, qui crie, clabaude, a la plus mauvaise tête, parle mal, écrit bien ; un homme plus obscur, Danton, est un fourbe, fripon, égoïste, scélérat dans toute la force du terme, comme certaines gens disent que je le suis ; un autre intrigant, qui se remue, s’agite, a une immense activité, l’ex-capucin Chabot ; un honnête homme, mais trop exalté, c’est Grangeneuve… Oh ! que je plains la nation, si ces fous sont mis en place ! Que je plains la nation, si l’on y met des nullités, comme nous en avons tant dans notre Assemblée actuelle ! Une foule de procureurs, d’avocats, des Chapelier, des Sumac, des… des… empestent l’Assemblée de l’esprit d’astuce et de chicane… Mon ami, si je cesse d’exister, que ces plumassiers feront de mal !… Si un homme méprisé, comme ce faquin de Robespierre, venait à acquérir quelque prépondérance, vous le verriez devenir grave, couvert, atroce… Moi seul, je pourrais l’arrêter… »

Peu de jours après cette conversation, Mirabeau mourut. « Je ne pus entrer, dit l’écrivain, pendant sa dernière maladie, parce que je n’étais pas connu de ses alentours, surtout du sieur Cabanis… Ah ! si Préval avait vécu, Mirabeau vivrait encore ! » Préval était un médecin qui avait sauvé Restif de plusieurs maladies dangereuses.

Restif attribue à la mort de Mirabeau la chute suprême de la monarchie. C’est en se voyant privés de ce dernier appui, appui intéressé sans doute, puisque Mirabeau comptait devenir une sorte de maire du palais, que Louis XVI et Marie-Antoinette se décidèrent au voyage de