Page:Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/32

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— Non, Monsieur.

— Vous venez des Cévennes ?

— Non, Monsieur.

— Vous êtes un perturbateur du repos public ?

— Non, Monsieur.

— Je sais que, dans le cabaret, vous avez prétendu vous appeler de Bucquoy ; mais, si vous êtes l’abbé de La Bourlie, se disant marquis de Guiscard…, vous pouvez l’avouer, le traitement sera le même : il s’est mêlé aux affaires des Cévennes ; vous vous êtes compromis avec les faux saulniers… Qui que vous soyez, je suis obligé de vous faire conduire dans les prisons de Sens.

Archambault de Bucquoy se trouva là avec une trentaine de faux saulniers dont le présidial de Sens faisait le procès ; le prévôt de Melun, envoyé pour cette affaire, regarda son arrestation comme imprudente et légère. Toutefois, plusieurs charges pesaient déjà sur lui.

Il avait été d’abord militaire pendant cinq ans, puis il était devenu ce qu’on appelait alors petit maître… et ensuite, « sans s’inquiéter de la religion chrétienne », s’était mis de celle « que certains prétendent être celle des honnêtes gens », ce qu’on appelait alors déiste.

Une aventure dont on ne connaît pas bien les détails, mais qui semble se rapporter à l’amour, jeta le comte de Bucquoy dans une sorte de dévotion trop exagérée pour avoir paru solide. Il se rendit à la Trappe, et chercha à observer cette loi du silence, si difficile à observer… Un jour, il se lassa de cette discipline, reprit son habit d’officier, et sortit de la Trappe sans dire adieu.

En route, il eut une querelle et fit une blessure à un homme qui l’avait insulté. Ce hasard malheureux le fit rentrer dans la religion. Il se crut obligé de se dépouiller de ses habits en faveur d’un pauvre, et ce fut alors qu’é-