Page:Nerval - Les Illuminés, 1852.djvu/331

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Voici quelques-unes des pages de la Thréicie publiée par Aucler :

« … Et ces religions dont les chefs étaient des hommes de mauvaises mœurs ; ces religions atroces qui ont employé de si horribles moyens pour se maintenir, prétendent avoir apporté aux hommes de nouvelles vertus inconnues jusqu’à elles, la charité universelle et le pardon des injures. Nous ne sommes pas nés pour nous seuls, disait Platon, nous sommes nés pour la patrie, pour nos parents, pour nos amis et pour tout le reste des hommes. La nature elle-même a prescrit, disait Cicéron, qu’un homme s’intéresse à un autre homme, quel qu’il soit, et par cela seul qu’il est homme. Nous sommes tous les membres d’un même corps, disait Sénèque ; la nature ne nous a-t-elle pas faits tous alliés ? c’est elle qui nous donne cet amour mutuel que nous avons les uns pour les autres ; et cette maxime était même sur les théâtres : Je suis homme, disait ce vieillard dans Térence, et rien de ce qui peut regarder un homme ne me doit être étranger. Les Perses n’avaient-ils pas leur fameuse loi d’ingratitude, selon laquelle ils punissaient tous les manques d’amour envers les dieux, les parents, la patrie, les amis ; les Égyptiens ne s’étaient pas non plus bornés à de simples préceptes, ils en avaient aussi fait une loi.

» Mais ne sait-on point, ou ce serait qu’on ne le voudrait pas savoir, que cette charité universelle était le premier point de la morale des mystères ? Quel est l’homme bon, dit Juvénal, digne du flambeau mystérieux, et tel que l’hiérophante de Cérès veut que l’on soit, qui pense que les maux d’autrui lui sont étrangers ?

« C’est sur nous seuls, dit un chœur dans Aristophane, que luit l’astre du jour, nous qui sommes initiés, et qui