Socrate, les plus sages des Grecs, Origène, Eusèbe et saint Augustin, ces flambeaux de l’Église, s’accordaient à distinguer le pouvoir des esprits élémentaires de celui des fils de l’abîme…
Il n’en fallait pas tant pour convaincre Cazotte, qui, comme on le verra, devait, plus tard, appliquer ces idées, non plus à ses livres, mais à sa vie, et qui s’en montra convaincu jusqu’à ses derniers moments.
Cazotte dut être d’autant plus porté à réparer la faute qui lui était signalée, que ce n’était pas peu de chose alors que d’encourir la haine des illuminés, nombreux, puissants, et divisés en une foule de sectes, sociétés et loges maçonniques, qui correspondaient entre elles d’un bout à l’autre du royaume. Cazotte, accusé d’avoir révélé aux profanes les mystères de l’initiation, s’exposait au même sort qu’avait subi l’abbé de Villars, qui, dans le Comte de Gabalis, s’était permis délivrer à la curiosité publique, sous une forme à demi sérieuse, toute la doctrine des rose-croix sur le monde des esprits. Cet ecclésiastique fut trouvé un jour assassiné sur la route de Lyon, et l’on ne put accuser que les sylphes ou les gnomes de cette expédition. Cazotte opposa, d’ailleurs, d’autant moins de résistance aux conseils de l’initié qu’il était naturellement très-porté à ces sortes d’idées. Le vague que des études faites sans méthode répandaient dans sa pensée, le fatiguait lui-même, et il avait besoin de se rattacher à une doctrine complète. Il fut curieux de connaître en détail tout ce qu’il n’avait que pressenti dans son livre, et, grâce aux instructions de son mystérieux visiteur, il ne tarda pas à être reçu membre de la loge des illuminés martinistes, qui, à cette époque, résidait à Lyon. Cette doctrine avait été introduite en France par Martinez Pasqualis, et renouvelait simplement l’institution des rites cabalistiques du xie siècle, dernier écho de la formule des gnostiques, ou quelque chose de la métaphysique juive se mêle aux théories obscures des philosophes alexandrins.
Cazotte était jeune encore à cette époque ; il pénétra dans ces mystères avec la foi la plus ardente ; soumis à des épreuves