Page:Nerval - Les Illuminés, Lévy, 1868.djvu/475

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fastidieux de raconter ses voyages dans les pays allemands, où il se dirigea en sortant de Suisse. Le comte de Luc, auquel Jean-Baptiste Rousseau a adressé une ode célèbre, était là ambassadeur de France et s’employa à faire sa paix avec la cour. Mais il n’y put réussir, non plus que la tante de l’abbé, la douairière de Bucquoy, qui adressa au roi un placet commençant ainsi :

« La veuve du comte de Bucquoy remontre très-humblement à Votre Majesté que le sieur abbé de Bucquoy, neveu du feu comte son époux, a eu le malheur d’être arrêté près de Sens pour le sieur abbé de la Bourlie, envoyé prétendu de M. de Marlborough, afin d’encourager les fauxçonniers répandus dans la Bourgogne et dans la Champagne, et tâcher d’y pratiquer une espèce de rébellion. »

La comtesse indiquait ensuite la fausseté de cette arrestation, et peignait les souffrances qu’avait dû subir un fidèle sujet comme le comte abbé de Bucquoy, confondu avec des révoltés et retenu d’abord dans la prison de Soissons avec les gens coupables de l’enlèvement de M. de Beringhen[1].

La comtesse tâche ensuite de faire valoir le courage qu’a eu son neveu de s’échapper de la Bastille, sans aucun éclat, le 5 mai, au prix de beaucoup de sueurs et de travaux… Cependant, arrivé en lieu étranger, il demande à faire valoir son innocence, protestant qu’il est un des plus zélés sujets du roi, mais, « de ces sujets à la Fénelon, qui vont droit à la vérité, où le prince trouve cette gloire qui ne doit son éclat qu’à la vertu… »

La comtesse fait encore observer « qu’il serait bon que les écrous de son neveu fussent partout rayés et biffés, à Sens, à Soissons, au For-l’Évêque et à la Bastille, et qu’il fût rétabli dans tous ses droits, honneurs, prérogatives et dignités, et qu’on lui restituât plus de six cents pistoles qui lui avaient été

  1. La Biographie universelle de Michaud dit M. le Premier. Le livre semi-allemand publié à Francfort, qui contient l’histoire originale de l’abbé de Bucquoy, nous fournit cet autre nom.