Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/111

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la fougue entraînante et la majesté triomphale de la stretta.

Si nous avions à faire une analyse musicale de l’œuvre de Liszt, telle qu’il l’a donnée ce jour-là, il nous serait impossible de ne point parler en particulier de chacun de ses chœurs ; nous nous bornons toutefois à rendre compte de l’impression générale qu’en a eue le public.

Le chœur des Océanides, auquel se joignent les voix des Tritons, a rencontré des applaudissements unanimes. Il s’y trouve d’heureux contrastes, des transitions imprévues. Sur une phrase lente et grave, le mot de paix flotte comme un souffle divin, et une solennité d’un caractère religieux empreint l’accompagnement instrumental ; après quoi les fanfares éclatent et les voix se modulent sur un rhythme de marche si mélancolique, que l’oreille l’aspire avidement et le garde longtemps. Les Dryades s’avancent comme en silence d’abord, et l’on n’entend qu’un murmure dans les instruments à corde, si léger qu’il semble un bruissement de feuillage formé par le plus imperceptible souffle. Peu à peu ces sons, à peine distincts, deviennent des mots, mais ils sont si doucement articulés, le chant est si vaporeux, son accompagnement si diaphane, qu’ils semblent arriver à travers l’écorce des arbres. du fond des calices des plantes, comme un soupir exhalé par une végétation qui emprisonne des âmes.