Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/341

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dans un des plus vastes établissements du quai de l’Escaut. Les bassins étaient si remplis, qu’un grand nombre de bricks et de frégates louvoyaient sur le fleuve en attendant leur tour. Quelle forêt de mâts, plus serrée et plus touffue qu’aucune forêt possible, car des arbres de cette taille ne sont jamais si rapprochés ! Des affiches annonçaient ce même jour quatre départs pour Archangel. — Replongeons-nous dans les rues, de peur de céder à de telles séductions.

En multipliant le nombre des capitaines de haut bord par celui des simples caboteurs, des officiers et des matelots d’une telle agglomération, on comprendra l’éclat inouï de ces riddecks, survivant au siècle où Rubens y a étudié les enlacements robustes de ses dieux marins et de ses océanides. Malheureusement l’imitation de Paris gâte tout. Plus de danses nationales, plus de costumes, excepté celui des Frisonnes, — qui viennent vous offrir, avec leurs coiffures de reines, leurs dentelles et leurs longs bras blancs, des œufs durs, de la morue découpée, des pommes rouges et des noix. Les vareuses et les chemises coloriées des matelots répandent aussi quelque gaieté dans cette foule. — De temps en temps, de belles personnes en costume de bal, et qui ne seraient désavouées dans aucun monde, forment le carré d’un quadrille tout féminin. Ensuite la valse mugit avec furie, imitant tous