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LES FEMMES DU CAIRE.

— Soyez tranquille, répondit-il, on rangera tous ces sacs, et ensuite vous serez très-bien.

Sur quoi, il nous fit ses adieux et descendit dans la djermé, qui ne tarda pas à s’éloigner.

Nous voilà donc, Dieu sait pour combien de temps, sur un de ces vaisseaux syriens que la moindre tempête brise à la côte comme des coques de poix. Il fallut attendre le vent d’ouest de trois heures pour mettre à la voile. Dans l’intervalle, on s’était occupé du déjeuner. Le capitaine Nicolas avait donné ses ordres, et son pilau cuisait sur l’unique fourneau de la cuisine ; notre tour ne devait arriver que plus tard.

Je cherchais cependant où pouvait être cette fameuse chambre du capitaine qui nous avait été promise, et je chargeai l’Arménien de s’en informer auprès de son ami, lequel ne paraissait nullement l’avoir reconnu jusque-là. Le capitaine se leva froidement et nous conduisit vers une espèce de soute située sous le tillac de l’avant, où l’on ne pouvait entrer que plié en deux, et dont les parois étaient littéralement couvertes de ces grillons rouges, longs comme le doigt, que l’on appelle cancrelats, et qu’avait attirés sans doute un chargement précédent de sucre ou de cassonade. Je reculai avec effroi et fis mine de me fâcher.

— C’est là ma chambre, me fit dire le capitaine ; je ne vous conseille pas de l’habiter, à moins qu’il ne vienne à pleuvoir ; mais je vais vous faire voir un endroit beaucoup plus frais et beaucoup plus convenable.

Alors, il me conduisit près de la grande chaloupe, maintenue par des cordes entre le mât et l’avant, et me fit regarder dans l’intérieur.

— Voilà, dit-il, où vous serez très-bien couché ; vous avez des matelas de coton que vous étendrez d’un bout à l’autre, et je vais faire disposer là-dessus des toiles qui formeront une tente ; maintenant, vous voilà logé commodément et grandement, n’est-ce pas ?

J’aurais eu mauvaise grâce à n’en pas convenir ; le bâti-