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APPENDICE.

Chacune d’elles porte aussi un mouchoir, ordinairement teint en bleu, qu’elles mettent sur leurs épaules, et quelques-unes tordent ce mouchoir des deux mains au-dessus de leur tête ou devant leur visage. Les cris des femmes, les chants animés des jeunes garçons et les tons lugubres sur lesquels psalmodient les yiméniyeh produisent une dissonance étrange.

Le prophète avait défendu les lamentations des femmes et la célébration des vertus du défunt à l’occasion des funérailles. Mahomet déclarait que les vertus qui étaient attribuées de la sorte au mort deviendraient pour celui-ci des sujets de reproche s’il ne les possédait pas dans son état futur. Il est vraiment remarquable de voir combien quelques préceptes du prophète sont chaque jour rejetés par les mahométans modernes, les wahhabis seuls exceptés. Nous avons vu quelquefois des pleureuses de la basse classe suivant un cercueil à visage découvert, après avoir eu soin de se barbouiller de boue dont elles avaient aussi couvert leur coiffure et leur poitrine. Cette coutume existait chez les anciens Égyptiens. Le convoi d’un homme opulent ou même d’une personne de la classe moyenne est parfois précédé de quelques chameaux chargés de pain et d’eau que l’on distribua aux pauvres devant le tombeau. Ces convois se composent de personnes plus variées et plus nombreuses. Les yiméniyeh ouvrent la marche en psalmodiant, comme il est dit plus haut, la profession de foi. Ils sont suivis des amis du défunt et de quelques hommes savants et dévots invités à prendre part à la cérémonie. Ensuite vient un groupe de fakirs psalmodiant le sourat El-Anam ; d’autres religieux suivent en chantant différentes prières, selon les ordres dont ils font partie et que de célèbres cheiks ont fondés ; suivent les bannières de l’un ou l’autre supérieur des derviches à moitié déployées ; puis viennent les jeunes écoliers, le cercueil et les pleureuses comme dans les autres convois, et, quelquefois, lorsque les porteurs sont d’un certain rang, leurs chevaux de main les suivent. En certaines occasions, le convoi