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APPENDICE.

qu’elle contient les secrets et les quittances de Notre-Seigneur, et il ne convient pas de découvrir à personne des choses où le salut des âmes et la vie des esprits se trouvent renfermés.

D. Nous sommes donc égoïstes, si nous ne voulons pas que tout le monde se sauve ? — R. Il n’y a point là d’égoïsme ; car l’invitation est ôtée ; la porte est fermée ; est hérétique qui est hérétique, et croyant qui est croyant, et tout est comme il doit être.

Le carême qui était ordonné anciennement est aboli aujourd’hui ; mais, quand un homme fait carême hors du temps prescrit, et se mortifie par le jeûne, cela est louable ; car cela nous rapproche de la Divinité.

D. Pourquoi a-t-on supprimé l’aumône ? — R. Chez nous, l’aumône envers nos frères les Druses est légitime ; mais elle est un crime à l’égard de tout autre, et il ne convient pas de la faire.

D. Quel but se proposent les solitaires qui se mortifient ? — R. C’est de mériter, quand le hakem viendra, qu’il nous donne à chacun, selon nos œuvres, des vizirats, des pachaliks et des gouvernements.

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L’auteur d’un ouvrage sur la Turquie, M. Ubicini, remarque avec raison que, malgré la navigation à la vapeur, malgré les progrès de la statistique moderne, l’Orient n’est guère plus connu aujourd’hui qu’il ne l’était durant les deux derniers siècles. Il est certain que, si le nombre des voyageurs a augmenté, les rapports de commerce établis autrefois entre nos provinces du Midi et les cités du Levant ont diminué de beaucoup. Les touristes ordinaires ne séjournent pas assez longtemps pour pénétrer les secrets d’une société dont les mœurs se dérobent si soigneusement à l’observation superficielle. Le mécanisme des institutions turques est, du reste, entièrement changé depuis l’organisation nouvelle que l’on ap-