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Page:Nettement - Études critiques sur le feuilleton-roman, 1re série, 1847.djvu/308

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ÉTUDES CRITIQUES.

n’êtes pas au bout. Sans vous parler plus longuement du conseiller Murph, sorte de Sancho Pança colossal, comme je vous l’ai dit en commençant, du don Quichotte de la confédération germanique, et en citant seulement pour mémoire le nègre David, dont la spécialité, comme médecin, est de crever les yeux à ceux que le prince Rodolphe juge indignes de voir la clarté du jour, j’arrive au notaire Ferrand.

Le notaire Ferrand, c’est le type du Tartufe exagéré jusqu’à l’hyperhole. Molière a peint, avec cette vigueur de pinceau qui lui est propre, l’hypocrite cachant sous le masque de la religion les deux passions les plus contraires à la religion, la cupidité et, pardonnez-moi ce vilain mot, la luhricité ; il l’a montré tombant dans le piège que lui tend Elmire avec une habile coquetterie, et amené par elle jusqu’ay point de déclarer sa passion scélérate devant Orgon, qui ne veut pas croire à sa perfidie. On peut dire que Molière a poussé le caractère de Tartufe aussi loin qu’il peut aller. La sensualité de cet odieux personnage est mise en relief dans ses rapports avec Elmire, sa rapacité et sa duplicité viennent admirablement s’exprimer dans ses rapports avec Orgon. C’est tout ce que peut supporter une littérature qui se respecte, et qui a affaire à des lecteurs qui veulent être respectés. Que si Molière eût fait un pas de plus, il tombait, d’un côté, dans la cynique et brutale peinture de l’amour physique, et, de l’autre, il prenait au pied de la potence un sujet indigne d’intéresser les honnêtes gens.

Au lieu d’un pas, M. Sue en a fait dix. Du sensuel