Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/257

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ne fut pas moins décisive, mais qui fut plus honorable ; il était l’hôte et le poëte de la Grèce, qui, par les souvenirs classiques qu’elle rappelle, est la seconde patrie de tous les hommes civilisés, et il précédait tous nos poëtes dans la glorification de cette terre dont la cause allait devenir bientôt populaire. Ce n’était pas le seul point sur lequel les idées de lord Byron se trouvaient en harmonie avec les idées dominantes : après le grand combat des principes catholiques contre l’incrédulité et le scepticisme dogmatique de l’école du dix-huitième siècle, une transformation s’opérait peu à peu dans la génération nouvelle, parmi ceux qui ne s’étaient point ralliés au catholicisme. Sauf les vieux débris de l’incrédulité positive et du scepticisme raisonné, on en arrivait à douter du doute comme de la foi, et ce doute du dix-neuvième siècle avait quelque chose de douloureux et d’inquiet. Cet état concordait admirablement avec la poésie panthéiste de lord Byron, qui reflétait les diverses situations où peut se trouver l’intelligence humaine lorsqu’elle a rompu les liens qui l’attachent à la vérité, et qu’elle a vu tomber en pourriture ceux par lesquels elle s’était volontairement enchaînée à l’erreur. Lord Byron, en effet, n’est ni un incrédule systématique ni un orthodoxe ; sa tête est comme une auberge sonore où toutes les idées viennent retentir, et ses poëmes sont des palais féeriques élevés au doute.

Ceci suffit pour faire entrevoir les résultats fâcheux de son influence littéraire. Une intelligence maladive,