Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/314

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l’arrêta, on le jeta dans une prison, où il rencontra le général Mallet, avec lequel il conspira le renversement de l’empire et dont il partagea le sort dans la plaine de Grenelle. L’arrestation violente du général Lahorie, son vieil ami, son exécution dans les plaines de Grenelle, restèrent comme deux dates de colère et de deuil dans le cœur du jeune enfant ; et plus tard, ses vers payèrent la dette de ressentiment qu’il avait contractée, ce jour-là, envers l’empire. Ce fut vraisemblablement l’arrestation du général Lahorie sous son propre toit qui détermina le général Hugo, alors majordome du palais à Madrid, à appeler sa femme et ses enfants en Espagne. Jusqu’à la fin de 1812, Victor Hugo habita cette poétique contrée qui devait souvent plus tard se mirer dans ses vers. Il avait dix ans, et déjà il était sensible à cette influence de la nature, du climat, des mœurs, des monuments, à ce rayonnement de toute chose sur l’âme du poëte. Quand la première restauration s’accomplit, Victor Hugo, rentré en France vers 1813, partagea la joie et l’enthousiasme vendéen de sa mère ; mais ce rétablissement de la paix dans le monde devait profondément troubler la paix de sa famille. Les dissentiments déjà anciens, qui existaient entre son père et sa mère, s’aigrirent ; l’incompatibilité des opinions amena entre eux une rupture qui devint une séparation juridique. Pendant les cent-jours, le général Hugo enleva ses enfants à leur mère, et plaça les deux plus jeunes, Eugène et Victor, dans une institution préparatoire à l’École polytechnique. Victor Hugo, en étudiant à regret les ma-