Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/428

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laissaient charger le pont de manière à le faire crouler. Nous retrouvons ici l’école que l’on rencontre dans tous les embranchements intellectuels, pendant la restauration, et que, faute d’autre nom, nous avons appelée l’école révolutionnaire ; école formée de provenances diverses, ayant souvent des aspirations contradictoires, ceux-ci venant du despotisme de l’empire, ceux-là du stoïcisme de la république, quelques-uns mus par des rancunes personnelles, résultats d’une position prise ou acceptée, presque tous réunis dans un sentiment de haine contre l’autorité politique et l’autorité religieuse fondées sur un principe incontesté, et préférant le dénigrement de toute autorité morale à la liberté.

Dans les premiers temps de la restauration, un recueil fondé par opposition au Conservateur centralisa cette coalition de haines identiques et d’espérances opposées. Ce fut la Minerve, dont les principaux rédacteurs étaient Benjamin Constant, Étienne, Jay, Jouy, Tissot, Pagès, Aignan, Courier, Béranger. La Minerve n’était point un recueil rédigé d’après un symbole politique précis, et développant un corps de doctrines arrêtées ; elle prenait tous les tons, même celui de la flatterie envers le roi tout en dénigrant la royauté, s’adressait à toutes les opinions hostiles et caressait les opinions les plus contraires. Être ennemi de la restauration et lui nuire, voilà le seul titre d’admission qu’elle exigeait. Du reste, depuis l’élégie sur les régicides jusqu’à l’églogue sur les soldats laboureurs, de-