Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/81

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nouveau gouvernement travaillait sur les faits, M. de Bonald travaillait sur les idées. Il ne dissimulait pas l’insuffisance du nouveau code, qui ne s’appuyait pas sur les bases immuables de la religion, et qui n’inscrivait pas, en tête de ses dispositions, ces vérités éternelles du Décalogue sur Dieu, l’homme et la société, qui sont le fondement de tous les devoirs, et par conséquent de tous les droits. « La révolution, disait-il, qui a commencé par la déclaration des droits de l’homme, ne finira que par la déclaration des droits de Dieu. »

Chose remarquable ! Sur plusieurs points, le penseur ne faisait que précéder le législateur dans une route où celui-ci allait bientôt le suivre, et les idées, comme cela s’est presque toujours vu dans l’histoire, marchaient en avant des faits. Ainsi, après avoir introduit dans les faits le catholicisme réhabilité dans les idées par la grande réaction intellectuelle que nous venons d’esquisser, le premier consul Bonaparte, devenu empereur, ne demeura pas longtemps sans proclamer l’hérédité du gouvernement dans sa famille, et sans rétablir une noblesse héréditaire, naturellement destinée aux services publics, pour tâcher d’obtenir cette fixité et cette durée des personnes sociales, que recommandait le philosophe comme la condition d’une société fortement organisée. Mais il devait s’apercevoir plus tard qu’il est difficile de créer une hérédité nouvelle dans une société déjà ancienne, et que les improvisations du génie lui-même ne valent pas les œuvres du