insista Mme de Béthencourt. Il est si difficile de vivre dans la gêne, quand on a toujours connu l’opulence.
— Son oncle n’avait-il pas voulu la marier avec le vicomte de Dreuil ?
— Oui, il en a été question, je crois ; mais cet officier n’a pas de fortune non plus, et cette perspective aura sans doute effrayé Paulette.
— Je comprends ! elle aura préféré ce vulgaire Wanel et ses millions à un garçon vraiment digne d’elle et de son rang. Elle me fait horreur, cette petite, et je regrette presque d’avoir consenti à vous accompagner à cette messe. Voyez, il n’y a personne de notre monde !
Pour toute réponse, Mme de Béthencourt poussa un profond soupir. Non ! il n’y avait personne de leur monde ! Et la bonne âme en souffrait pour la Paulette qu’elle aimait et qu’elle excusait en dépit de tout.
— Oh ! ma chère, murmurait en ce moment Berthe de Couteville — une des demoiselles d’honneur — à sa sœur également demoiselle d’honneur, a-t-elle de la chance cette Paulette ! Il paraît que ce gros pot-à-tabac l’aime tant, qu’il a déjà fait son testament et qu’il lui lègue toute sa fortune, dans le cas où il mourrait avant elle.
— Une bonne affaire pour Paulette, répondit l’autre en clignant de l’œil, car je crois qu’elle sera veuve avant de longues années. Il est apoplectique, pour sûr ! Regarde-moi ce cou de taureau, ma chère ! et cette figure violette ! Vrai ! on dirait qu’il va éclater !
— Qui donc a conduit la mariée à l’autel ? demandait à son voisin le notaire de l’endroit, un monsieur décoré, à la tournure militaire.
— C’est un parent du marié, je crois. M. de Neufmoulins, l’oncle de la jeune fille, n’a même pas voulu assister au mariage ; il paraît qu’il est furieux. Il n’y a d’ailleurs personne de sa famille, excepté la vieille demoiselle, là-bas, dans le chœur au second rang.
— Fâcheux pour la petite ! fit remarquer le monsieur décoré. Le vieux pourrait bien la déshériter. Est-elle sa plus proche parente ?