Page:Nichault - Anatole.djvu/109

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vait que celui-là avait laissé des traces profondes dans le souvenir d’Anatole ; il est si naturel de s’attacher aux objets de son dévouement, et de vouloir aimer une femme déjà captivée par la reconnaissance ! Voilà les suppositions qui occupèrent longtemps l’esprit de Valentine, avant de s’arrêter sur la pensée de cet obstacle invincible, qui aurait été le premier sujet des réflexions de toute autre personne. Son imagination n’en fut pas vivement tourmentée : elle se peignit Anatole soumis aux volontés d’un père ambitieux, et peut-être lié par des promesses qu’il n’osait ni accomplir, ni enfreindre, réduit à attendre sa liberté d’un malheur : elle ne voyait dans sa conduite mystérieuse qu’une preuve de la délicatesse qui doit interdire à un homme d’honneur le désir de faire partager un sentiment malheureux. Enfin, à travers cette obscurité profonde, elle voyait clairement tout ce qui expliquait à son gré la situation d’Anatole. C’est ainsi que tout l’esprit imaginable ne sauve pas des absurdités du cœur.



XIX


Le jour de la semaine où madame de Nangis recevait du monde étant arrivé, Valentine pensa qu’à moins de se dire malade, elle ne pouvait se dispenser de paraître chez sa belle-sœur ; mais, pour éviter