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Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/21

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le dîner, qu’il conduisait les enfants à la promenade, et revenait ensuite soigner le capitaine Mansley que la goutte retenait sur son canapé. Il était le modèle des serviteurs, et même des amis ; car loin de profiter de la liberté que le capitaine lui avait donnée et des offres avantageuses qui lui avaient été faites par de riches maîtres, il était resté fidèle au sien, en dépit du malheur.

Le soir, pour mieux dissimuler les fatigues de sa journée, et distraire les trois petites filles du capitaine de l‘impression qu’elles ressentaient en voyant souffrir leur père et pleurer leur mère, il leur chantait des airs créoles et leur apprenait la danse de son pays. Ellénore, plus jeune que ses sœurs, était la plus adroite à singer les mines du vieux nègre, aussi avait-il pour elle une admiration passionnée qui la lui faisait vanter sans cesse. On ne restait pas cinq minutes avec lui sans lui entendre parler d’Ellénore ; ses traits si fins, ses joues roses, ses beaux cheveux blonds, ses grâces enfantines, ses espiégleries surtout étaient un continuel sujet d’éloges. On ne pouvait les entendre sans éprouver le désir de connaître l’enfant qui les inspirait ; et c’est à cette exaltation singulière qu’on peut attribuer la curiosité, et par suite l’intérêt que la duchesse de Montévreux prit à Ellénore.

La duchesse revenait de Londres, où les plaisirs de la brillante saison l’avaient retenue deux mois ; les suites d’une traversée fatigante la forcèrent de se reposer quelques jours à Boulogne avant de se rendre à Paris. Une femme de chambre anglaise qu’elle ramenait à sa suite, rencontra Zaméo sur les bords de la mer servant de gouvernante aux enfants du capitaine. À leur mise, elle a bientôt reconnu de petits compatriotes, elle s’ap-