Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/244

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Mais je n’aurai jamais sa grâce à saluer, ajouta-t-il en montrant madame de Châteauroux. Mon Dieu, qu’elle est belle !…

— Toutes ces réflexions ne sont point d’usage en pareille circonstance, dit madame de Lauraguais en prenant gaiement la main que le roi lui présentait… Si, quand Votre Majesté est assise sur son trône et daigne recevoir nos salutations, nous disions ainsi tout haut ce que nous pensons d’elle, cela lui paraîtrait fort inconvenant.

— Et peut-être fort désagréable, interrompit le roi en riant.

— Eh bien, que Votre Majesté se soumette à l’étiquette : un grand sérieux, un silence complet, l’attitude respectueuse, et le premier salut à une grande distance. Songez que toute la cour vous regarde !

— Ah ! que cela est ennuyeux, dit le roi, et qu’il y a de mérite à ne pas être d’une gaucherie extrême en faisant ces éternelles révérences !

— Eh bien, pour un roi vous saluez à merveille, seulement vous ne baissez point assez les yeux ; c’est manquer à la puissance souveraine que de la regarder ainsi.

— Ah ! pour cela, je me révolte, dit Louis XV ; je veux bien m’incliner ; me prosterner même devant ma souveraine, mais c’est pour l’admirer de plus près.

— Voilà un hommage bien respectueux, vraiment, reprit-elle ; au premier avis, à la moindre contrariété, Votre Majesté se révolte. Ah ! j’en suis fâchée, Sire, mais vous ne ferez jamais qu’un mauvais sujet.

Le roi était de bonne humeur, il prit fort bien la plaisanterie, et madame de Châteauroux fut traitée en reine le reste de la journée.



XLVII

CE QUE PEUT UNE FEMME


Nous ne la suivrons pas pendant cet hiver où l’amour du roi pour elle ne se ralentit pas un instant ; nous arri-