Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/141

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quetterie pour avoir occasion de la désapprouver davantage. Sir James défendit Jeannette ; il assura qu’elle était pleine d’innocence, et fit d’elle un éloge qui dura plus d’un quart d’heure ; il finit par dire que si cet officier était assez indigne pour insulter à tant de candeur, par des propos libertins, il le chasserait de chez sa sœur, malgré toutes les suites que pourrait avoir une pareil esclandre. J’étais encore toute stupéfaite de la chaleur avec laquelle il en parlait, lorsque la contredanse finit. Alors il se leva, fut à Jeannette, lui dit que sa mère la demandait, et la conduisit près d’elle, sans s’inquiéter de ce que dirait son danseur en la voyant ainsi disparaître. J’avoue que ce beau zèle me sembla au-dessus de celui qu’on doit avoir pour défendre la vertu des séductions du vice ; et ne voulant pas dire à sir James ce que j’en pensais, je rejoignis ma belle-mère et madame de Gercourt, qui étaient dans le salon de jeu. Cette dernière me parla de toutes les personnes qui s’y trouvaient, et m’en fit des portraits aussi plaisants que peu flattés.

— Voyez, me disait-elle, cette jeune provinciale, toute couverte des plumes, des perles et des fleurs que depuis trois ans elle reçoit de Paris ; remarquez les mines gracieuses qu’elle fait à ce grand jeune homme, dont la coiffure énorme ressemble à celle de M. Desmasures, et voyez de quel air dédaigneux