Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/286

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frapper. Delval arrêta mon bras et le coup que je me portai me blessa légèrement. Pourquoi sa barbare pitié m’a-t-elle conservé la vie ?… Sans doute il prévoyait que mes remords vengeraient mieux le trépas de son ami.

« À la vue du meurtre dont elle était la cause, l’indigne milady s’enfuit, en emportant la haine et le mépris dûs à sa double perfidie.

« Cependant le malheureux Henri respirait encore ; après avoir arrêté le sang qui coulait de sa blessure, nous le transportâmes chez Delval. Les chirurgiens furent appelés, et prononcèrent l’arrêt fatal, en nous assurant que les remèdes qu’ils allaient employer ne prolongeraient que de quelques jours son existence. C’est alors que je m’abandonnai à l’excès de mon désespoir. Delval en fut touché. Mes larmes apprirent à Henri le sort qui l’attendait ; il me plaignit lui-même, et permit que je ne le quittasse point. Il voulut savoir ce qui m’avait porté à cette cruelle vengeance. Je lui racontait mon histoire.

« — Cessez de vous affliger, me dit-il après l’avoir écoutée ; un instant d’égarement a causé nos malheurs : ce n’est pas sur moi qu’il faut pleurer, bientôt je ne souffrirai plus… Mais ma Laure…, mon Emma, qu’allez-vous devenir ?… Mes amis, ajouta-t-il en prenant la main de Delval, jurez-moi de cacher à ma chère Laure que je reçus la mort en combattant