Page:Nichault - Le Marquis de pomenars.djvu/23

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POMENARS.

Et ton air consterné te ferait reconnaître ; ne serait-ce pas là de la tristesse bien placée ? Va, mon pauvre garçon, le ciel a bien fait de ne pas te destiner à l’état de séducteur, tu serais mort de frayeur à ton premier succès.

GERMAIN.

J’enrage de vous voir ainsi vous amuser d’une existence insupportable, changer de nom, de cachettes tous les mois.

POMENARS.

Ah ! cette vie a bien ses agrémens, surtout en France où les femmes aiment tant à protéger ceux que l’injustice persécute. Par exemple, dans toute autre circonstance, je n’aurais pas osé aller passer quinze jours chez madame de Sévigné, sans la prévenir au moins de ma visite. Eh bien, aujourd’hui je m’y rends en toute confiance, sûr d’un accueil enchanteur et de ces petits soins mystérieux, qui font quelquefois ressembler le malheur à l’amour.

GERMAIN.

Mais dites-moi, monsieur, comment il faut vous appeler ici ?

POMENARS.

Ce maudit postillon ayant dit que j’allais aux Rochers, je me suis vu forcé de prendre le nom d’un habitué du château ; et c’est celui de M. d’Hacqueville qui m’est venu le premier à l’idée, ne va pas l’oublier.

GERMAIN.

Vraiment, je n’ai garde ; mais savez-vous bien chez qui vous êtes ici ?