Page:Nichault - Le Moqueur amoureux.djvu/172

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de l’entreprendre, il me fait un devoir de ne plus chercher à paraître aimable.

Par suite de ces réflexions, Albéric se décida à brûler le billet qu’il venait de joindre à l’éventail de madame de Lisieux, dans l’intention de le lui renvoyer. Car ce billet, quoique fort court portait l’empreinte d’un sentiment trop vif, trop tendrement respectueux pour ne pas toucher un peu celle qui l’avait inspiré ; et Albéric commença par cette épreuve la série des sacrifices que sa générosité devait lui imposer.

Mathilde attendait à chaque instant le renvoi de cet éventail qu’elle n’avait pas laissé par inadvertance entre les mains de M. de Varèze ; quelquefois même, en se rappelant la manière dont elle lui avait dit adieu chez madame Ribet, elle se flattait qu’enhardi par l’émotion qu’elle se reprochait d’avoir si mal cachée, il oserait peut-être lui rapporter lui-même cet éventail. Aussi, devoirs, plaisirs, rien n’avait pu la décider à sortir de chez elle pendant la longue journée qui s’écoula entre le contrat et la cérémonie nuptiale.

Il arrive parfois qu’à force d’espérer une chose, on se persuade qu’elle nous a été promise. Mathilde commença par s’avouer qu’elle n’avait pas accueilli M. de Varèze de façon à lui ôter toute idée de rancune de sa part ; ensuite elle pensa qu’il l’avait devinée, et qu’il s’exposerait sans crainte au hasard d’être bien ou mal reçu ; puis elle se mit à l’attendre ; et quand l’heure des visites fut passée, elle se trouva au même degré