Page:Nichault - Leonie de Montbreuse.djvu/58

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le sacrifice en eût plus de prix aux yeux de M. de Montbreuse, et il ajouta :

— Si je vous avais inspiré le moindre sentiment, jamais votre père n’eût obtenu la promesse de me rendre éternellement malheureux ; mais ce procédé me rendra, j’espère, mon courage ; je ne donnerai pas au monde entier le plaisir de rire de ma sotte crédulité, je vous obéirai, je vous fuirai, et l’indignation que j’éprouve me rendra la force de cacher ma douleur.

En finissant ces mots, il se leva brusquement, et je restai stupéfaite de tant de colère et d’injustice.

Je crus qu’un moment de réflexion le ramènerait à des sentiments plus doux, et qu’il reviendrait bientôt auprès de moi ; mais j’ignorais que l’orgueil irrité ne s’apaise qu’après s’être vengé. Alfred me prouva cette cruelle vérité : je le vis s’approcher de madame de Rosbel dont la beauté fixait tous les regards, augmenter le nombre de ceux qui s’empressaient autour d’elle, et obtenir sur eux la préférence la plus marquée. Madame de Rosbel, attribuant le retour d’Alfred à l’éclat