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Page:Nichault - Physiologie du ridicule.pdf/108

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rôle qui doit fixer l’opinion de tout un public sur notre intelligence ! Quel temps d’espoir, de douces agitations, que celui du noviciat d’un acteur de boutique ou de salon ! Il se voit d’avance sous un jour également favorable à sa vanité ; car, si son costume est beau et de bon goût, il l’embellit, et, s’il est laid, il prouve beaucoup pour l’esprit de celui qui sait ainsi se sacrifier aux intérêts dramatiques. Grands effets de scène, applaudissements répétés, il rêve déjà tout ce qui constitue un succès éclatant.

Est-il jeune, ce succès doit décider d’un plus grand encore. On n’entend pas vanter impunément l’homme qu’on soupçonnait déjà d’un peu d’amour, et dont la bouche va vous faire nettement l’aveu de sa passion, sans que vous ayez le droit de vous en fâcher, ou la possibilité de n’y pas répondre. L’emploi de grande coquette une fois accepté, il faut bien le remplir de son mieux. Imiter les regards furtifs, les soupirs encourageants, les émotions de commande ; toutes ces singeries mènent au vrai. À force de voir tomber l’amant de la comédie à ses pieds, on finit par l’y laisser. Quel triomphe pour l’artiste amateur !

Est-il vieux, on le choie, on le flatte ; car sa