elle cherche à se calmer, car l’heure approche où il faudra paraître heureuse à des yeux indifférents ;… mais, pour cette fois, elle ne saurait s’y tromper, c’est bien sa porte qu’on ouvre… c’est Adhémar !… Dans l’excès de l’émotion où cette certitude la plonge, elle n’ose tourner ses regards du côté de la bibliothèque, tant elle craint de s’abuser ; la voix d’Adhémar ne lui laisse plus de doute.
— Passer ainsi la nuit, dit-il d’un ton amer, sans prendre un moment de repos ! il faut que votre esprit soit cruellement agité. Je serais fâché que mon retour fût cause d’une si cruelle insomnie ; cependant j’ai cru devoir m’expliquer avec vous à ce sujet.
En disant ces mots, Adhémar s’était approché de la cheminée, et se trouvait en face d’Ermance. Elle le regardait avec un étonnement qui tenait de la stupeur. Incertaine sur la nature du coup qui doit la frapper, la pâleur d’Adhémar, la sombre expression de son visage lui annoncent assez que d’amers reproches et peut-être un arrêt fatal vont l’accabler ; résignée à tout, elle attend en silence qu’Adhémar se soit remis du trouble qu’il parait avoir peine à surmonter.
— Dans les termes où nous en sommes, reprit-il d’une voix altérée, il faut autant qu’il est possible éviter de mettre le public dans la nécessité de porter sur vous et sur moi un jugement qui nous flétrirait tous deux.
— Que voulez-vous dire ? prononça à voix basse Ermance.
— Vous le savez aussi bien que moi, reprit Adhémar avec un sourire de dépit.
Et la malheureuse Ermance sentit un frisson mortel circuler dans ses veines.
— Vous n’ignorez pas davantage, poursuivit-il, le parti que la méchanceté sait tirer de semblables faiblesses ; vous savez que la réputation d’une femme en souffre encore moins que celle du mari qui parait les tolérer.
En cet instant, Ermance, ne pouvant plus supporter le regard de M. de Lorency, baissa la tête et tomba dans l’accablement stupide d’un criminel qui écoute sa sentence.
— Je ne vous reproche point, continua-t-il, une préférence