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Page:Nichault - Un mariage sous l empire.djvu/263

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dans la liste des grâces qu’on veut répandre à la naissance de l’enfant impérial.

— Si je savais, reprit Ermance avec fierté, qu’on pût attribuer cette faveur à un motif dont M. de Lorency aurait à rougir, j’irais à l’instant même supplier l’empereur…

— Quelle folie ! interrompit vivement madame de Cernan ; iriez-vous lui dire que les sentiments qu’on lui suppose pour vous ne vous permettent pas d’accepter ses bienfaits, ou plutôt la reddition des biens qui nous appartiennent très-légitimement ? Ce serait lui donner l’idée d’une corruption humiliante pour tous deux, et que sa rancune de Corse ne vous pardonnerait pas, je puis vous l’affirmer.

— Il ne saurait m’accuser d’une telle pensée ; il ne m’a rien dit qui dût me l’inspirer.

— Eh bien, alors pourquoi vous révolter contre une action dont vous connaissiez mieux que personne toute la générosité et l’innocence ?

— Mais si le monde en juge autrement ?

— Le monde est un joueur qu’on a toujours de son parti quand on gagne : quelque chose que vous fassiez aujourd’hui, il dira, soit que vous acceptiez ou non, que c’est une faveur qui en acquitte une autre, ou bien que, son caprice passé, l’empereur n’a pas voulu le payer si cher ; ainsi n’agissez point en considération des propos de la malveillance ; il est des situations où tous les sacrifices possibles ne les font point taire : la vôtre est de ce genre. Vous savez que, dans ce bienfait, rien ne doit blesser votre honneur, ni celui de votre mari, ni même votre délicatesse : que cette assurance vous suffise, songez qu’il y va de la fortune de toute notre famille, et qu’il serait cruel de la perdre par une pruderie inutile.

— Je sens fort bien, reprit Ermance, que cette fortune n’étant pas la mienne je n’ai pas le droit d’en disposer ; mais si pourtant on me croyait capable de…

— Tranquillisez-vous, ma chère, on ne croit que ce qui est vrai, reprit madame de Cernan oubliant qu’elle venait de dire le contraire ; on saura bientôt que ce qu’on a pris pour un commencement d’aventure n’était qu’une simple conver-