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LA DAME DU DÉSERT

Six mois de bled stérile. Six mois pendant lesquels il n’avait vu que le sol déchiqueté et farouche du désert et ces hommes rudes qui, sous sa conduite, construisaient une piste nouvelle s’avançant interminablement vers l’infini des horizons incendiés de soleil.

Il avait connu, sous la tente, les heures les plus palpitantes et les plus mornes à la fois de sa vie d’ingénieur. Lentement, il avait appris à déchiffrer le Sahara, sa luminosité irréelle, sa splendeur morte, ses coloris somptueux.

Mais, en mettant le pied sur le sol de la première ville, il se sentait prêt à l’oublier déjà.

Descendu à l’hôtel Transatlantique, un bain le délassa. Il retrouva son rasoir avec une joie toute neuve et, lorsqu’il eut changé son costume de toile kaki contre un vêtement européen, il se regarda dans une glace en souriant.

Une envie irrésistible de se mêler à la foule l’entraîna dehors. Il partit devant lui, à l’aventure.

La veille, lorsqu’il était arrivé, il avait eu un coup au cœur en embrassant, d’un seul regard, les cinq villes du M’zab qui venaient d’éclore sous ses yeux au milieu des montagnes rocailleuses comme un sourire du désert.

C’était donc là cette terre qui, gardant du passé ses règles immuables, avait fait surnommer ses habitants les puritains de l’Islam.

Les Mozabites ont créé, il y a mille ans, ces oasis étonnantes où, sans arrêt, des trois mille puits creusés